France Politique

Valls pris dans la nasse d'Internet

Publié le  Par Patrick Béguier

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Le Net va peut-être jouer un vilain tour au gouvernement. La loi sur le travail de Myriam El Khomri a tant mobilisé d'internautes contre elle qu'elle pourrait bien finir dans une corbeille d'ordinateur.

 
 
 
Manuel Valls a dû se résoudre à repousser d'une quinzaine de jours l'examen de la loi El Khomri devant la lame de fond qui se lève devant lui. Car les vagues de protestation se chevauchent l'une l'autre sous l'effet d'un courant de plus en plus puissant : Internet ! 
 
La pétition lancée en ligne "Loi travail : non, merci !" avait recueilli près de 800 000 signatures hier soir. D'autres vont s'ajouter dans les jours qui viennent. Il ne serait pas surprenant de compter plus d'un million de signataires la semaine prochaine. Du jamais vu pour une pétition ! C'est la première mauvaise surprise pour le gouvernement. L'irruption de son projet de loi, la fêlure du Code du Travail qu'il laisse entrevoir, le manque évident d'explications, de pédagogie, dans un contexte politique détestable (imbroglio de la déchéance de nationalité, crise agricole, charge de Martine Aubry…), avec un exécutif au plus bas dans les sondages, laissaient prévoir de vives réactions de la gauche et des syndicats. Elles ont eu lieu, mais ont été vite débordées par la révolte montée des profondeurs du Web. 
 

L'ombre du CPE

 
Deuxième mauvaise surprise : un appel à manifester le 9 mars est parti de… Facebook. Ce mercredi sera, annonçait-on, une "journée noire" dans les transports, les quatre syndicats représentatifs de la SNCF appelant à la grève, suivis par deux syndicats de la RATP. Des mouvements déclenchés par des revendications catégorielles. Mais si les internautes se transforment en manifestants de rue avec, à leur tête, les organisations étudiantes et lycéennes, et derrière des pancartes "On vaut mieux que ça", la journée prendra un tout autre visage. Totalement politique, celui-là.
 
Dans le cas d'une forte poussée à Paris et dans d'autres grandes villes françaises, on pourrait revivre un scénario à la CPE : Manuel Valls obligé de reculer comme y avait été obligé, en 2006, Dominique de Villepin. N'oublions pas que la terreur de François Hollande, ce ne sont pas les blocages des taxis en colère ni les tas de fumiers des agriculteurs devant les grilles des préfectures, mais la révolte de la jeunesse. Cette jeunesse dont il s'est voulu, pendant sa campagne présidentielle de 2012, l'ardent défenseur !
 

Avec les "Youtubeurs"

 
Troisième mauvaise surprise : le monde des "Youtubeurs" (les animateurs de chaînes You Tube) semble mettre en sommeil pour un temps ses créations vidéo artistiques, musicales ou autres, pour se lancer dans la bagarre… sociale et politique. L'on voit défiler tout ce qui insupporte notre jeunesse (et les autres ) : la précarité, le harcèlement, les discriminations, les vagues promesses de CDI… On est bien loin des lendemains enchanteurs promis par la réforme néo-libérale du gouvernement. La confiance, de toute façon, n'est plus là. Le Medef en est grandement responsable. Il avait promis un million d'emplois avec le CICE et le Pacte de responsabilité. On n'a rien vu. Comment s'imaginer, pensent ces jeunes (et les autres), qu'en réduisant les protections des travailleurs, l'emploi sera enfin au rendez-vous, alors que les économistes se répandent sur tous les plateaux de télé en affirmant que le carnet de commandes est le seul véritable point de repère pour les entrepreneurs. Le pire engendrera le pire encore, craignent-ils.
 
 
Le mercredi 9 mars pourrait donc être une journée historique. La première portée par la force du Web !

 


Patrick Béguier est journaliste, éditorialiste et écrivain.
Son dernier roman : "Seaghan, l'enfant de mer", une histoire fantastique et écologiste (Geste éditions)






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