France Politique

Dossier fraude fiscale (2/3) : l’association Anticor veut faire « sauter le verrou de Bercy »

Publié le  Par Antoine Sauvêtre

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Anticor

Malgré la satisfaction du gouvernement concernant l’efficacité précoce de la loi de lutte contre la fraude fiscale, certains la jugent encore trop frileuse. Contacté par Paris Dépêches, Eric Alt, vice-président de l’association Anticor, qui lutte contre la corruption, réclame plus d’indépendance pour les instances juridiques.

L’association Anticor se présente elle-même comme « un groupe de pression militant et une force de propositions qui a pour objectif de rendre les citoyens plus vigilants et les hommes politiques plus rigoureux dans leur gestion des affaires publiques. » Son vice-président, Eric Alt, a donc particulièrement suivi le projet de loi de lutte contre la fraude fiscale.
 

Pour lui, si elle présente « quelques avancées modestes », la loi ne va pas assez loin dans l’esprit de transparence et d’indépendance des juridictions et il appelle à « mettre fin au monopole du ministre du Budget » en matière de lutte contre la fraude fiscale.
 

Paris Dépêches : La loi de lutte contre la fraude fiscale, promulguée le 6 décembre dernier,  sera-t-elle efficace ?

Eric Alt : La position d’Anticor est mitigée. Il y a en effet quelques avancées modestes, comme le fait que les associations de lutte contre la corruption puissent se porter partie civile ou au niveau des investigations techniques telle que la copie des données comptables. Mais cela reste très frileux en termes de véritable lutte contre la fraude fiscale. La principale critique que nous portons est le maintien du monopole du ministre du Budget pour les poursuites en matière fiscale. Il est urgent de faire sauter le « verrou de Bercy ». C’est une singularité en Europe qui a été dénoncée au Parlement et critiquée dans le rapport Bocquet/Dupont-Aignan. Une telle mainmise est paradoxale quand on veut lutter efficacement contre les fraudes. La mise en place d’un parquet financier [annoncé en même temps que la loi] est une conséquence de l’affaire Cahuzac, mais cela n’y change rien. Il sera nommé sous les mêmes formes que le parquet de Paris et n’aura donc pas plus d’indépendance. Il viendra simplement lui faire concurrence et remet en cause le principe d’indivisibilité du parquet.
 

Certaines des avancées que vous défendiez dans le texte de loi ont été censurées par le Conseil Constitutionnel. Quel est votre ressenti ?

Il y a toujours un équilibre à respecter entre efficacité de la lutte contre les fraudes et protection des libertés. Cet équilibre est difficile à apprécier. Pour moi, l’article visant à moduler les amendes des personnes morales frauduleuses par rapport à leur chiffre d’affaires respectait cet équilibre et pourtant il a été censuré. La fixation des amendes pour pratiques anticoncurrentielles est pourtant assez similaire (amendes proportionnelles à la valeur des ventes). Mais pour le cas de la loi de lutte contre la fraude fiscale, le Conseil Constitutionnel a été très scrupuleux. Nous prenons acte de cette décision.
 

Quels sont les points de la loi telle qu’elle est aujourd’hui qui vous satisfont ?

Ils ne nous satisfont qu’à demi. L’article autorisant les associations de lutte contre la corruption est, certes, une avancée car cela donne une possibilité d’actions à ce genre d’associations. Mais c’est le gouvernement qui donnera les agréments pour se porter partie civile. L’avancée est donc à nuancer. Et puis l’augmentation du nombre de dossiers de régularisation qui arrivent à Bercy est évidemment quelque chose de positif mais cela est un effet indirect de la loi. Il reste encore beaucoup de choses à mettre en place.
 

Quelles nouvelles avancées réclamez-vous ?

Le principal objectif est mettre fin au monopole de Bercy en terme de lutte contre la fraude fiscale. Nous réclamons également la déclassification immédiate des documents classés « secret défense » lorsqu’un juge en fait la demande. Cela doit devenir automatique comme c’est le cas en Allemagne ou en Italie, par exemple. De plus, nous souhaitons une obligation de poursuites. C'est-à-dire que lorsque le parquet a connaissance d’une infraction, celui-ci devra engager des poursuites contre le fraudeur, et non avoir la possibilité de le faire comme c’est le cas actuellement. Cela participera à plus d’égalité. Enfin, au niveau international, il faut multiplier les échanges de données et améliorer l’identification des sociétés écrans pour lutter plus efficacement contre la fraude.
 

Le dossier sur la loi de lutte contre la fraude fiscale :
 

1/3 : Fraude fiscale : où en est la lutte contre la grande délinquance économique ?

2/3 : Fraude fiscale : l’association Anticor veut faire « sauter le verrou de Bercy »

3/3 : Fraude fiscale : "Le combat contre la fraude fiscale est permanent" pour Yann Galut (PS) 







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