Grand Paris Société

Catastrophe de Brétigny : le rapport accablant des experts sur la SNCF

Publié le  Par Raphaël Didio

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Flickr - Aleix Cortès

Les experts judiciaires ont rendu leur rapport concernant l'accident de Brétigny-sur-Orge survenu le 12 juillet 2013, coûtant la vie à 7 personnes et faisant 32 blessés.

L’accident de Brétigny-sur-Orge (Essonne)  du 12 juillet 2013 serait bien dû à un défaut d’entretien du matériel. C’est en tout cas le constat accablant des experts judiciaires pour les services de maintenance de la SNCF, d’après les rapports d’expertise ferroviaire et métallurgique commandés par les juges d’instruction, dévoilés par le Figaro ce dimanche soir. C’est ce lundi que doit le procureur d’Evry doit rendre ces conclusions publiques. La SNCF et RFF (Réseau Ferré de France) ont réfuté dans un communiqué diffusé en début de soirée « tout état de délabrement du réseau à Bretigny comme ailleurs ». 

Ils ont ainsi rappelé que « dès les premières heures, la SNCF, en plein accord avec RFF, a assumé d'emblée sa responsabilité dans l'accident ». L'entreprise de transport réclame « la plus grande prudence dans l'interprétation » de ces rapports, qui feront « l'objet d'un débat contradictoire dans le cadre du débat judiciaire ». La SNCF d’ajouter : « La sécurité est la priorité absolue du système ferroviaire français ». Elle a ensuite détaillé les mesures mises en place depuis le drame de Brétigny. Ce lundi à 17 heures, les deux présidents de RFF et SNCF s’exprimeront devant la presse.Des causes claires : « La ruine d'un assemblage éclissé est la cause du déraillement du train SNCF Intercités n°3657 qui s'est produit en gare de Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013 », écrivent noir sur blanc Michel Dubernard et Pierre Henquenet, ingénieurs et experts auprès de la cour d'appel de Douai. L'éclisse est une lourde agrafe métallique qui permet de relier entre eux des rails.

Délabrement, fatigue, usure : pour la SNCF, le rapport remis par les experts est d’une extrême sévérité. Ces derniers ont ainsi constaté un « état de délabrement jamais vu par ailleurs ». Pour eux, le matériel a lâché pour des raisons très claires : « L'armement a péri par fatigue, vibrations, battement, défauts de serrage, usure, etc. Tous dommages relevant de la qualité de la maintenance. »


La SNCF savait : les ingénieurs déclarent que « les examens métallurgiques qui ont été effectués permettent d'établir que nous ne sommes pas en présence d'un acte de malveillance, et que le processus ayant abouti à la désagrégation complète de l'assemblage s'est bien au contraire étalé sur plusieurs mois et a concerné l'ensemble de l'appareil de voie incriminé, sur lequel ont été relevées plus de 200 anomalies de divers degrés de criticités. La plupart de ces anomalies étaient connues de la SNCF ou de ses agents sans pour autant qu'ils soient remédiés de façon adéquate ».


Catastrophe annoncée : ce n’est pas la seule éclisse qui aurait pu lâcher. D'« autres assemblages éclissés, situés sur le même itinéraire que celui qui a lâché avaient entamé, trait pour trait, le même type de processus de dégradation que leur homologue dont la ruine a entraîné le déraillement du train », écrivent les experts. « L'historique de la maintenance démontre que dès 2008, les TJD (NDLR : traversées jonction double) de Brétigny-sur-Orge préoccupaient manifestement les ingénieurs de la SNCF », au courant de « défauts récurrents d'alignement et de dressage ».


Une maintenance inadaptée : les deux ingénieurs estiment que « la surveillance du comportement de l'armement a été défaillante » et que la « situation particulière, bien connue de ses services, aurait logiquement dû conduire la SNCF à une surveillance accrue, et surtout adaptée ». C’est tous les ans et non tous les trois ans qu’il aurait fallu les démonter pour les vérifier. Les tournées de vérifications sur le terrain auraient dû permettre la « remise en conformité immédiate de l'assemblage défectueux ». Ce n'était pas le cas et les ingénieurs indiquent « nous avons nous-mêmes constaté l'absence d'usage de la clef dynamométrique, outil servant à respecter les valeurs de serrage efficace des boulons ».

Un manque d’expérience du personnel : une remarque des experts laisse à croire que le personnel chargé de détecter les anomalies et de les réparer n’a toujours pas l’expérience requise.  « Il reste aussi important à dire que le personnel SNCF chargé de la mise en œuvre de la maintenance des voies et appareils devrait être choisi, tout d'abord selon des critères de solide formation à la construction mécanique et de surcroît avoir reçu une formation spécialisée approfondie ».


Des recommandations oubliées : Michel Dubernard et Pierre Henquenet déplorent « une insuffisance de prise en compte et de traitement des anomalies rencontrée » et que rien ne se passe lorsque les défauts sont relevés : « De nombreuses observations faites au cours des tournées de surveillance se sont trouvées reportées d'une opération à l'autre, pour finir parfois par disparaître sans pour autant qu'on ait eu la certitude qu'elles aient été traitées. »


Des manuels d’entretiens trop volumineux : les experts constatent également que le personnel sur le terrain doit faire son métier en consultant « des référentiels de maintenance volumineux, surabondants, parfois inadaptés voire contradictoires donc contre-productifs ». Ces guides « sont de toute évidence impossible à assimiler complètement, et de ce fait à mettre en œuvre sur le terrain de façon cohérente. »


La vitesse doit être réduite à Brétigny : si le train Corail ne roulait pas trop vite au vu de la limitation de vitesse sur ce tronçon, avec une vitesse de 137 km/h, bien en dessous des 150 km/h réglementaires sur cette voie, les experts estiment que c'est encore trop rapide pour ces voies en piteux état. « Il serait souhaitable de limiter à 100 km/h la vitesse des trains à l'approche de la gare de Brétigny ».


Danger à Noisy-le-Sec : les experts ont fait le constat que Brétigny n’est sans doute pas un cas isolé. L’installation de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) serait dans un état inquiétant d’après les constations des deux experts. 







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