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Les Pêchers, nouveau livre de Claire Castillon : « L’amour, c’est un souffle»

Publié le  Par Jacques-Henri Digeon

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Jean-François Paga

Claire Castillon a bousculé la rentrée littéraire avec son nouveau livre ‘’Les pêchers’’. Dans ce roman acide, Claire Castillon va au cœur des sentiments. Notre chroniqueur littéraire Pascal Hébert l’a rencontrée.

Romancière à l’imagination particulièrement fertile et ébouriffante, Claire Castillon nous offre dans ‘’Les Pêchers’’ trois regards sur une vie d’aujourd’hui, où tout change à la vitesse de la lumière… ou plutôt d’un tweet. Après avoir posé son œil aigu sur les couples, la romancière s’inscrit dans l’époque en passant au scalpel toutes les facettes d’une famille recomposée. Elle va droit au but…. Trois femmes dominent ce roman. Il y a Tamara, perdue entre la volonté de son mari et le regard qu’elle jette régulièrement dans le rétroviseur pour repenser à un amour perdu. Ses idées passent de la réalité au rêve. La comparaison entre ce qu’elle vit et ce qu’elle a connu s’impose obligatoirement. Entre ces deux univers qui s’opposent, son cœur balance. D’autant plus qu’elle a sur sa route Esther, la fille de son mari qui se pose comme un obstacle. L’histoire s’entremêle avec Aimée, la mère d’Esther, qui elle aussi, s’interroge sur son nouvel amour. Sont-ils faits pour vivre ensemble et ne pense-t-il pas trop souvent à son ex ? Entre deux, Esther, adolescente ballotée d’une histoire à l’autre, se construit et cherche elle aussi à être aimée.
 

Paris Dépêches : Qu’est-ce qui vous donne cette envie irrésistible de parler des couples ?

Claire Castillon : Je dirais que j’ai davantage envie d’écrire sur l’amour que de parler des couples. J’aime ce qui agite l’intériorité des êtres, et l’amour est un excellent agitateur d’être, qu’il en soit sujet, objet, victime, ou contemplateur.


Comment vous est venue l’idée d’écrire sur la famille recomposée ?

J’ai croisé, en moi, ce personnage d’enfant observant. Sans doute qu’il y a dans son œil quelque chose de l’écrivain. Et c’est ce regard permanent, dès l’enfance, qu’il m’intéressait d’explorer. Un regard qui va vers les autres et parfois se replie vers soi, comme si les autres étaient trop aveuglants. Comment le regard de cette fille est-il ressenti par les autres ? Et comment est-il ressenti par une femme qui n’est pas sa mère puisque c’est sa belle-mère ?


Pourquoi avoir choisi délibérément de mettre l’accent sur trois femmes ?

Elles sont venues au cours de l’écriture. Il y a eu l’enfant, Esther, et puis la belle-mère, Tamara, et puis la mère, Aimée. Comme s’il me fallait repasser par la mère pour comprendre l’enfant.


Tamara, l’héroïne du premier volet, n’est-ce pas un peu vous ?

Elle est moi et pas moi, comme Aimée, comme Esther. Ce que nous avons de plus similaire est cette danse parfois, en nous, comme s’il y avait trop de mots et qu’il nous fallait quand même inventer pour expliquer exactement ce qu’on a dans la tête. Comme si on savait d’avance qu’on ne serait pas entendues complètement.


Pourquoi faut-il, lorsque la vie s’annonce joyeuse, aller regarder en arrière ?

Le passé n’est pas forcément le contraire de la joie. Il y a de beaux souvenirs, de belles nostalgies, des regrets essentiels. J’aime les paysages que j’ai dans la tête, même s’ils ne sont pas tous des photos de l’instant.


Vous montrez la vie d’une famille recomposée avec des situations pas évidentes, notamment les relations avec une belle-fille.

Je n’ai pas eu le choix du thème, ni cherché à explorer une situation plutôt répandue pour ne pas dire à la mode. Les personnages se sont assemblés, exactement comme le font les êtres dans une famille recomposée : ils cherchent leur place, parfois ils la trouvent, parfois ils se cognent longtemps avant de glisser encore. Oui, écrire un roman a quelque chose à voir avec ça : on ne se connaît pas, alors on va vivre ensemble.


Aimée, la seconde femme, a le sentiment de n’être pas assez… aimée, pour quelle raison ?

Aimée fait le choix d’aimer au minimum. A condition que l’amour ne soit pas synonyme d’angoisse. Elle n’a pas gardé un bon souvenir de son histoire d’amour avec Claude, le père d’Esther, elle s’est sentie incomprise, malmenée, rabaissée, et elle a décidé que sa vie serait la liberté. Alors elle cherche à monter sa boîte, tâche pour laquelle elle n’a aucun talent. Mais s’accrocher à cette perspective lui donne l’impression d’être une femme concrète.


Est-ce que nous sommes toujours dans la quête du sens de la vie ?

Je ne crois pas. Il arrive qu’on se pose la question, lors de grands choix : à quoi ça sert tout ça ? Mais on ne cherche pas le sens, et sans doute pas assez. On se soucie à peine des directions, on se passe de courage, on profite, on fait des petits arrangements avec le très-bas, non, parfois on n’est pas très beau ! Etre dans la quête, c’est accepter d’être dans le dénuement, ça veut dire le silence, l’absence, le minimum. On se noie souvent dans le brouhaha, le déjà dit, le superflu.


C’est quoi l’amour, Claire Castillon ?

C’est comme l’âme, je dirais que c’est un souffle. Mais quand je me le représente dans la nature, je me dis que ça ressemble à un arbre. L’amour d’une vie, avec des racines et des bras, des feuilles comme des pages pour se mettre à l’abri.


Propos recueillis par Pascal HEBERT.
 


"Les Pêchers" de Claire Castillon (L’Olivier). 204 pages. 17 €.


Claire Castillon en bref 

- Claire Castillon a débuté en littérature avec "Le grenier" en 2000.
- Spécialiste des nouvelles, elle a publié "Insectes" suivi de "On ne peut pas empêcher un petit cœur d’aimer" qui ont remporté un vif succès.
- Claire Castillon vit à Paris et dans son refuge dans le sud.







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