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Quelle réforme fiscale pour François Hollande ?

Publié le  Par Jennifer Declémy

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Thème de campagne important pour François Hollande, la réforme fiscale est un thème actuellement à l'étude par le Gouvernement mais la grande révolution fiscale promise risque bien de n'être au final qu'une vague réformette de plus.

 

Ce sera le grand chantier économique des prochains mois pour le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Promesse de campagne martelée pendant des mois par François Hollande, la réforme fiscale est devenue une nécessité en France devant le constat de dégressivité désormais constatée de l’impôt sur le revenu et des impôts payés par les entreprises. Cependant, si initialement la réforme fiscale prônée par le nouveau président était d’une grande ambition, aujourd’hui, elle n’apparait pas à la hauteur des enjeux.

 

 

·         Quelle fiscalité en France ?

 

 

« 50% des français les plus modestes (…) ont des taux effectifs d’imposition s’étageant de 41 à 48% avec une moyenne de 45%. Les 40% suivants dans la pyramide des revenus (…) sont tous taxés à des taux entre 48 et 50%. Puis à l’intérieur des 5% des revenus les plus élevés et surtout les 1% les plus riches, le taux effectif d’imposition se met très nettement à décliner et ne dépasse guère 35% pour 0,1% des français les plus aisés ». Ce constat fait par l’économiste Thomas Piketty est on ne peut plus accablant pour le système fiscal français qui est devenu, au fil des années, dégressif et beaucoup trop complexe, créant ainsi un sentiment d’injustice parmi les français, et notamment les classes moyennes qui pensent désormais être celles qui paient le plus d’impôts.

 

Le système d’impôt actuel se base sur le système créé en 1914 et réformé seulement trois fois, en 1945, en 1959 et en 1990. Cependant, au gré des différentes lois de finances adoptés par les différents Gouvernements, des ajustements ont eu lieu, des changements ont été effectués, des impôts ont été créés ou supprimés  et le système général est devenu d’une illisibilité complète pour les citoyens. Mais plus encore, c’est le sentiment d’une injustice fiscale qui s’est accentué ces dernières années, notamment à cause de plusieurs mesures adoptées ces dix dernières années qui offrent bien plus de facilités fiscales aux ménages les plus aisés.

 

Si les différentes tranches d’impôts sur le revenu permettent normalement une progressivité de l’impôt parmi les citoyens, l’existence de niches fiscales est l’élément clé qui explique aujourd’hui la dégressivité de la fiscalité, avec une accumulation qui se constate ces dernières années et qui remet carrément en cause le principe même de progressivité de l’impôt. Ces niches fiscales coûtent à l’heure actuelle 73 milliards d’euros par an à l’état français, la plus importante étant la défiscalisation des heures supplémentaires votée durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Les niches fiscales et sociales concernant les entreprises elles sont de l’ordre de près de 172 milliards d’euros par an.

 

De même, depuis 2004, les inégalités de patrimoine ont fortement progressé entre les français, avec 5% des citoyens les plus aisés détenant 35% du patrimoine, et 10% des français les plus modestes en possédant 0,05%. Cela est dû notamment à trois éléments qui ont aggravé la dégressivité du système fiscal en France : le durcissement du bouclier fiscal, la quasi-suppression des droits de succession et le démantèlement partiel de l’ISF.

 

Mais ce ne sont pas que les ménages qui subissent un système fiscal devenu injuste. Les entreprises aussi doivent faire face à un système de taxation particulièrement aberrant où les petites entreprises ont un taux d’imposition s’établissant en moyenne à 39,5% tandis que les grandes entreprises ont une moyenne d’imposition de 18,6%. Plus incroyable encore, les entreprises du CAC 40 en 2009 ont eu une moyenne d’imposition de 4,3%.

 

A partir de tous ces éléments, le think-tank Terra Nova fait le constat suivant, « les différentes mesures d’exonération fiscale et l’abaissement de l’impôt se traduisent par le renversement de l’ordre de 20-30 milliards d’euros pour les ménages les plus favorisés depuis 2006 ». Dans le même temps, les PME sont les premières entreprises à subir la crise et à ne plus pouvoir embaucher et en 2010, ce sont entre 239 000 et 523 000 français qui ont basculé dans la pauvreté. Les grandes fortunes elles continuent de prospérer sans discontinuer.

 

C’est donc à partir de ces constats que le président socialiste actuel a fait campagne pendant plusieurs mois sur une réforme de la fiscalité, plaidant pour une refonte totale du système pour y induire davantage de justice. Aujourd’hui cependant, la réforme prônée risque d’accoucher d’une réformette à l’automne.

 

 

·         Les promesses de François Hollande et la réalité des choses.

 

 

« La réforme fiscale s’impose comme une nécessité financière, sociale et morale. Nos prélèvements sont devenus antiredistributifs et antiéconomiques. Ils pénalisent l’emploi et protègent les plus fortunés » déclarait ainsi François Hollande durant sa campagne présidentielle, qui a duré environ un an. Et dès le mois de mars 2011, le socialiste parle encore et toujours de fiscalité alors que son parti adopte dans son programme présidentiel le principe d’une révolution fiscale extrêmement ambitieuse. Une fois désigné candidat officiel, François Hollande a cependant peu à peu allégé ses ambitions fiscales pour n’offrir qu’une vague promesse de réforme dont on ignore encore les points de détail.

 

Initialement, le projet du Parti socialiste prévoyait une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG avec un prélèvement à la source qui devrait s’adapter nettement plus rapidement aux évolutions de situation des français. De plus, le système du quotient familial devait être remplacé par un crédit d’impôt et la révolution fiscale voulue avait pour objectif d’aboutir à la même imposition des revenus du capital et du travail, la suppression d’une bonne partie des niches fiscales, la modulation de l’impôt sur les sociétés et un allégement de la cotisation sur le travail prélevée sous la forme d’une contribution carbone.

 

Durant sa campagne présidentielle, François Hollande a cependant nettement reculé par rapport à cette ambition saluée par plusieurs économistes. Ainsi, la suppression du quotient familial est devenu un simple abaissement du seuil après les critique de la droite ; le principe de fusion de l’impôt sur le revenu et la CSG a également été abandonné car, dixit Michel Sapin « la fusion n’est pas un but en soir. Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur système ». Au final, les seules mesures martelées par l’ancien candidat furent la taxation des très hauts revenus à 75% et le relèvement de l’impôt sur le revenu de 41 à 45%.

 

A l’heure actuelle, on sait que le Gouvernement veut supprimer plusieurs niches fiscales comme la défiscalisation des heures supplémentaires, modifier les droits de succession, augmenter l’ISF et peut-être mettre en place certaines taxes. Les détails ne seront cependant révélés que durant les débats budgétaires à l’automne prochain. Et si ces mesures rapporteront effectivement de l’argent, quid d’un bouleversement nécessaire de la fiscalité sur les entreprises ? Quid de la fameuse justice fiscale dont parlait tant François Hollande durant les mois de la campagne présidentielle ?

 

Une réforme en profondeur du système fiscal français est aujourd’hui indispensable, d’autant plus dans un contexte de nécessaire réduction des déficits publics. Alors que le système fiscal actuel n’est plus adapté à la complexité du monde moderne, à l’évolution des situations personnelles et aux détails du monde du travail, il est à craindre que la nouvelle équipe au pouvoir n’adopte qu’une « réforme Canada Dry » comme le prédisait il y a quelques mois le journaliste Laurent Maduit (Médiapart). C’est pourtant à l’aune d’une réforme fiscale promise que l’exécutif pourrait mettre en exergue son volontarisme, son adaptabilité aux enjeux contemporains et son courage politique.