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Groupes Colère : la révolution n'a pas eu lieu

Publié le  Par Fabrice Bluszez

Crédit image © France3 (copie d'écran)


"Bloquons tout" disait la page Facebook "Vous en avez marre c'est maintenant", appelant à une manifestation nationale le 27 janvier à 15 heures. Un mois après, la neige et le froid ont fait mieux que les groupes Colère.

A travers la création des groupes Colère, Leandro Antonio Nogueiras s'adressait directement à l'Etat, demandant des rassemblements "le 27 janvier à 15 heures devant toutes les préfectures". L'Etat a bien compris le message et le 9 février, le leader national entrait en prison. Pour "conduite sans permis et refus d'obtempérer" disait une administratrice du groupe. "Pour escroquerie" précisait la préfecture. Le problème n'est pas tant l'accusation, c'est qu'on parle au peuple en lui mentant...
 


Pas dans les grandes villes
 

Et pourtant, Leandro Antonio Nogueiras a mis le doigt sur un vrai problème : il y a une France "profonde", des petites villes de province, qui souffre de la pauvreté, de la précarité et d'un sentiment d'abandon. Si bien que l'appel a vite été suivi massivement en Saône-et-Loire (22.000 membres) et en Dordogne (17.000 membres), et que des groupes se sont créés dans l'Aisne, les Landes, dans la Loire, le Cher, etc., souvent appuyés sur des groupes de motards. Rien de sérieux à Paris, ni à Lyon, ni à Marseille... 

 

Ensuite, il y eut des récalcitrants. Les administrateurs créaient le groupe depuis Périgueux et prétendaient l'administrer de là (ce sont les groupes marqués "appartient à Vous en avez marre..."). En Saône-et-Loire, ça n'a pas plu. Des motards ont créé Colère71000 et ont manifesté, les premiers, un autre jour. Ils ont pâti de leur inexpérience, l'Etat réagissant au moindre manquement : convocation des administrateurs pour entrave à la circulation, contravention aux manifestants pour plaque non visible ou non-péage de l'autoroute.

Depuis, les volontaires pour déclarer et organiser les manifestations manquent. Administrer un groupe Facebook est une chose, organiser et tenir un cortège de manifestants demande de l'expérience. On parle ici ou là de se constituer en association. Mais Colère est "apolitique" et hostile aux syndicats comme aux partis. Et l'organisation manque de lieu de réunion, de structure représentative...


Confrontation à Châlon entre 300 manifestants et les forces de l'ordre (copie d'écran France3).


Ce n'est pas une révolte, c'est une conspiration


Autre souci : le refus de toute communication. Les groupes Colère, encore aujourd'hui, sur Facebook, sont "fermés". On ne sait ce qu'il se passe qu'en en étant membre. On ne peut donc pas partager les photos, vidéos et les annonces... Ce n'est pas une révolte populaire, c'est une conspiration. On se bat parfois à l'intérieur du groupe pour le pouvoir. En Dordogne, certains administrateurs ont été écartés, toute critique étant mal venue. Le seul espace de parole libre est le groupe "Défouloir du 24". La presse ayant été déclarée aussi "pourrie" que les politiques, elle est insultée, menacée... Et on s'étonne ensuite de la faible audience du mouvement, contraint de se faire connaître en distribuant des tracts sur les parkings ou quand il bloque la circulation...
 

 Les journaux Sud-Ouest et Le Journal de Saône-et-Loire.
 

Prochaine manif nationale les 9 et 10 mars
 

Un mois après, le mouvement rassemble au total 100.000 personnes sur toute la France (membres de groupes) mais pas plus de 300 aux manifestations dans les villes moyennes. Il lance, via le groupe "Vous en avez marre", un nouveau rendez-vous national : les vendredi 9 et samedi 10 mars.
 

A Châlon-sur-Saône (Saône-et-Loire), la manifestation avait été stoppée sur les zones commerciales périphériques et interdite d'entrer au centre-ville. L'idée de manifester le vendredi (groupes Vous en avez marre...") est récente, elle s'accompagne d'une présence nocturne : « Et pour les plus guerriers, on sort les Quechua, les sacs de couchage, les barbeuc, le Thermos et tuticuanti... La Nuit de la Cohésion. »

 

L'action s'accompagne d'initiatives charitables. En Dordogne, le groupe Colère24 soutient un gréviste de la faim, Anthony, qui proteste contre le manque de moyens à l'EPAHD de Ribérac. Il y a une pétition. Il semble avoir été entendu, selon France Bleu. En Saône-et-Loire, le groupe Colère 71000  a lancé un souscription pour motoriser le fauteuil roulant d'un motard handicapé.