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Edwige Antier : Le sexe intéresse plus que l’éducation

Publié le  Par Paris Dépêches

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La semaine dernière, la députée de Paris (des 8ème et 9ème arrondissements) et pédiatre, Edwige Antier, a annoncé son intention de déposer une proposition de loi rendant hors-la-loi les sévices corporels infligés aux enfants. Face aux commentaires souvent goguenards entendus ou lus dans les médias, la pédiatre déplore le manque d’intérêt que suscite l’éducation des tout jeunes enfants.

Pourquoi cette idée aujourd’hui ? Y a t-il une recrudescence d’actes violents envers les enfants ?

Edwige Antier : Oui, les chiffres augmentent. Les sondages sont mauvais d’ailleurs. En 2007, Familles de France a mené une enquête sur ce sujet qui montre que 17% des papas interrogés utilisent encore le martinet. Nous sommes au Moyen Âge. Je suis pédiatre : je vois dans ma pratique quotidienne que les parents ne savent plus comment éduquer leurs enfants. Un exemple : vous avez un bébé d’un an sur les genoux, devant une table. L’enfant veut y attraper votre téléphone portable. Pour lui dire "non", vous lui mettez une tape sur la main. En faisant cela, vous l’exercez à vous provoquer. Après la claque, il va vous regarder avec des yeux malicieux et, recommencer.
Il faut juste lui dire "non", sans le frapper, et placer le mobile ailleurs. Moi, je dis toujours "non, mais"… et je propose des feutres pour faire un dessin.

Quelle différence faite vous entre une fessée sur la couche et un coup sur la main après une bêtise ?

Il n’y a pas de différence. Ce sont deux châtiments corporels. La fessée sur la couche, c’est très choquant. Taper un bébé, sur son derrière, en traître ? C’est insupportable.

Que répondez-vous aux gens qui rétorquent "Moi, je me suis pris des claques, ça ne m'a pas tué" ? On entend souvent cela.

Encore heureux qu'ils ne soient pas morts. Je pense qu'on a toujours besoin de cautionner l'éducation de nos parents. Souvent, des personnes adhèrent même aux sévices qu'elles ont subis, c'est comme ça.

Votre proposition de loi a été largement commentée la semaine dernière dans les médias. Les remarques étaient souvent amusées, parfois véhémentes… Comment les avez-vous reçues ?

Cela fait bizarre d’entendre des observateurs mélanger des considérations d’adultes avec l’éducation des enfants. J’ai entendu beaucoup d’évocations de jeux érotiques faisant appel à la fessée. Étrange mélange des genres. Cela montre que le sexe intéresse plus que l’éducation.

Vous êtes députée de plein exercice depuis juillet. Comment vivez-vous votre mission ?

C’est un bonheur. Avec moi, c’est un peu comme si les enfants entraient à l’Assemblée nationale. Je prends mon rôle très au sérieux.

L'abolition  des sévices corporels aux enfants a déjà été décidée dans dix-huit pays européens (de la Suède à la Roumanie en passant par l'Italie ou l'Espagne…)