Brésil : la contestation sociale, nouveau prix à payer pour l'organisation d'une coupe du Monde ?

Le Brésil s'apprête à connaître une nouvelle journée de mobilisation ce 20 juin. Les organisateurs, qui communiquent notamment par les réseaux sociaux, espèrent rassembler près d'un million de personnes dans les rues – pour un pays qui compte 194 millions d'habitants.

La mobilisation avait commencé le 17 juin, notamment en raison des dépenses mirifiques prévues pour l'organisation de la Coupe du Monde de football, alors que la classe moyenne s'inquiète de ses conditions de vie. Les manifestants reprochent à l'Etat de ne rien faire pour améliorer la qualité des services publics comme la santé et l'éducation.

Les municipalités de Sao Paulo et Rio de Janeiro, les deux plus grandes villes du pays, ont d'ores et déjà accepté d'abaisser les tarifs des transports en commun sous la pression de la mobilisation. Mais les contestataires veulent étendre le mouvement. Des cortèges sont ainsi prévus dans 80 grandes villes du pays.

11 milliards d'euros

Les dépenses annoncées pour l'organisation du prochain Mondial – qui vont s'élever à près de 11 milliards d'euros – cristallisent l'amertume d'une partie de la population. À Rio, les manifestants envisagent de défiler symboliquement aux abords du gigantesque stade Maracana, le 30 juin prochain, là où se tiendra la finale du Mondial.

Le coût de l'organisation de la compétition est généralement aux trois quarts à la charge de l'Etat, qui espère des retombés économiques. Celles-ci sont souvent importantes et les partenariats avec les diffuseurs et autres mécènes permettent souvent de rénover des infrastructures comme les transports et les voies de circulation.

Si les coûts d'organisation des coupes du Monde ont fortement augmenté au cours de la décennie 90, ils se sont stabilisés dernièrement. À titre d'exemple, la compétition organisée par la France en 1998 avait coûté près de 10 milliards d'euros soit une dépense presque égale à celle prévue par le Brésil en 2014.

Craintes de corruption

Les Coupes du Mondes de Football représentent normalement un investissement immédiatement plus rentable que les Jeux Olympiques – que le Brésil va également organiser en 2016... Les JO , s'ils constituent une vitrine positive pour l'organisateur, comportent des compétitions moins fédératrices, qui se négocient moins aisément en droits de diffusion.

Des experts ont estimé que l'organisation des JO par la Grèce, en 2004, avait aggravé l'état du pays et creusé sa dette. Mais l'investissement hellénique reposait, dès l'origine, sur un déficit structurel – qui a été aggravé, semble-t-il, par le coût des JO.

Selon Claudia Damasceno Fonseca, directrice du Centre de recherches sur le Brésil colonial et contemporain, lié à l'EHESS, citée par Le Monde, «cette crainte [des Brésiliens] d'une dépense excessive avec les équipements sportifs, alors que la population a besoin d'autres types d'investissements dans les infrastructures, existe depuis que la décision a été prise d'organiser la Coupe du monde dans le pays. On savait que la corruption menaçait l'organisation, l'équilibre des comptes et le bon choix pour les investissements.»