Souvenirs dormants, de Patrick Modiano

Les aventures du narrateur servent de prétexte au romancier pour nous conter la rencontre au sens noble du terme. A une époque où tout va un peu trop vite, des écrivains comme Modiano nous rappellent entre deux, entre les lignes, qu’il ne faut pas oublier de perdre du temps pour s’enrichir de l’autre. Même si l’autre n’est pas forcément celui que l’on attend, que l’on aimerait voir apparaître.

Construit comme une belle promenade dans un Paris en noir et blanc des années soixante, "Souvenirs dormants" est bien là pour nous éveiller à nous-mêmes, à celui que nous sommes devenus. En plongeant dans sa mémoire, émotionnelle principalement, le narrateur revient sur les pas de sa jeunesse où il a grandi à travers des histoires que des passants lui ont fait vivre. Des histoires de rencontres dans des cafés de l’époque. Comme dans un film du petit Marcel Carné, on voit apparaître des personnages interlopes à la Jouvet. Nourri par des détails temporels ou géographiques, ce récit de Patrick Modiano est un petit bijou d’écriture. Avec Modiano, comme pour tout un chacun, les souvenirs se heurtent à la mémoire sélective : « A mesure que je précisais l’itinéraire, c’était comme si je l’avais déjà suivi et je n’avais même plus besoin de consulter l’ancienne carte d’état-major. Mais était-ce vraiment le bon chemin ? Dans vos souvenirs se mêlent des images de routes que vous avez prises et dont vous ne savez plus quelles provinces elles traversent. »

Pascal Hébert

Souvenirs dormants, de Patrick Modiano. Editions Gallimard. 106 pages. 14,50 €.