Monde Economie

Doit-on redouter une nouvelle crise alimentaire mondiale ?

Publié le  Par Jennifer Declémy

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Sujet qui passe relativement inaperçu, l'augmentation du prix des céréales sur les marchés financiers font craindre à certains une nouvelle crise alimentaire mondiale.

 

Alors que les prix des céréales ont augmenté de 17% suite, entre autres, à la sécheresse constatée en Russie et aux Etats-Unis cet été, certains craignent d’ores et déjà une réédition des émeutes de la faim de 2008 et 2010. A l’époque, le G20 s’était même emparé du sujet, mais avait failli à répondre à ce problème avec suffisamment d’ambitions.

 

Le pic le plus haut pour le prix des céréales avait été atteint en février 2011, et selon la FAO, les prix actuels restent 12% inférieurs à ceux record de 2011. De même, les cours du riz, de la viande et des produits laitiers n’ont pas bougé pour le moment, ce qui donne des raisons d’espérer même si un point critique a été atteint pour les céréales.

 

« Il est possible que se développe une situation comparable à celle de 2007-2008 » avoue avec crainte un économiste de la FAO, Abdolreza Abbassian. A l’époque, la brusque envolée des prix du blé puis des céréales avaient déclenché des violentes émeutes de la faim à Dakar, Mexico ou encore le Caire. Aujourd’hui, ce sont les conditions climatiques qui contribuent à cette envolée des cours alors que les Etats-Unis connaissent une sécheresse historique, à des niveaux jamais atteints depuis 1936. Pour les mêmes raisons, les prévisions de production de blé en Russie et en Ukraine ont été revues à la baisse.

 

Devant cette envolée des prix, la communauté internationale a semblé faiblement mobilisé et en France, le sujet est même passé à la trappe, vacances obligent. Mais face aux tensions sur les marchés, le Forum de réaction rapide, créé par le G20 en juin 2011, pourrait être réuni très rapidement. Présidé par la France, le dispositif devrait consulter ses partenaires fin août pour décider d’une convocation ou non du forum. L’un des objectifs prioritaires du forum est d’éviter les prises de décision unilatérales comme des embargos sur certains produits agricoles par certains pays pour ainsi « permettre aux pays de se parler pour éviter de prendre des décisions individuelles qui soient collectivement non rationnelles » indique le ministère de l’agriculture. Tout le monde a ainsi en mémoire la décision de la Russie en 2010 d’interrompre ses exportations de céréales, ce qui avait avivé la pression sur les prix.

 

Les marges de manœuvre du G20 sont néanmoins faibles, étant donné son incapacité à réformer les marchés financiers agricoles mais aussi à tout simplement réguler les aléas climatiques qui se multiplient ces dernières en raison du réchauffement climatique. Cependant, devant ces envolées régulières des prix, de plus en plus de voix s’élèvent contre la spéculation sur les prix agricoles que certains jugent « indécente » voire « immorale ». Ainsi, en juillet dernier, le directeur général de FAO a estimé que la communauté internationale devrait très sérieusement réfléchir à l’impact de la spéculation sur la volatilité des prix alimentaires.

 

« La spéculation financière exacerbe les fluctuations du marché, ce qui entraine un climat d’incertitude. Cette exacerbation anarchique et non réglementée a des effets dramatiques sur les pays importateurs nets de nourriture » souligne le président de la République dominicaine. Ce dernier a appelé l’attention des Nations unies sur ce problème et l’ONU a d’ailleurs lancé un débat sur ce sujet. Mais pour le président de FAO, « l’idée que la spéculation a joué un rôle dans la récente volatilité des prix a fait prendre davantage conscience aux gouvernements de la nécessité de renforcer les réglementations pour la limiter. C’est toutefois la forme et l’ampleur de ces réglementations qui suscitent des controverses ».

 

Mais les conséquences les plus graves d’une aggravation de cette crise alimentaire mondiale concernerait, naturellement, les pays les plus pauvres de la planète, et notamment ceux d’Afrique. Comme le fait remarquer le président du groupe de la banque mondiale, Jim Yong Kim, « lorsque les prix des denrées alimentaires augmentent fortement, les familles réagissent en retirant leurs enfants de l’école et en consommant de la nourriture moins chère et moins nutritive, ce qui peut avoir des effets désastreux sur le bien-être social, physique et mental de millions de jeunes tout au long de leur vie ».

 

Pour le moment, si les experts estiment que la menace n’est pas totalement avérée, ils reconnaissent néanmoins que la situation reste aléatoire et dépend en grande partie de la météorologie qui ne peut être maitrisé par l’Homme. De par les bas niveaux des stocks et la spéculation sur les cours qu’on ne régule pas encore suffisamment, l’insécurité alimentaire reste très vive dans plusieurs régions du monde.







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