France Politique

Groupes Colère : la 1re révolution partie de Facebook ?

Publié le  Par Fabrice Bluszez

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Lancé contre la limitation de la vitesse à 80km/h, le mouvement « Colère + dpt » semble être la première révolte spontanée organisée à partir de Facebook. Moderne ? Non, tribal surtout...

Marchera ou marchera pas, ce soulèvement populaire  ? On le saura ce samedi 17 février avec les manifestations dans tous les départements, convergeant vers les préfectures.

 

Les motards sont rebelles

 

La manifestation du samedi 17 février, dans chaque département, devant la préfecture, c'était son idée, à Leandro Antonio Nogueira, maçon portugais d'une trentaine d'années, habitant la Dordogne, qui a créé le premier groupe "Vous en avez marre c'est maintenant" (90.000 membres) et lancé très vite des groupes locaux par département. « C'est ma propriété », disait-il. Au point qu'il a voulu assurer le contrôle en étant administrateur dans chaque groupe.


En Saône-et-Loire, ça s'est mal passé : les motards, qui avaient été 1.500 à se rassembler à Sevrey, dès le 13 janvier, se sont rebellés et ont créé un groupe dissident, Colère71000. Lequel a manifesté à sa propre date, le samedi 10. : environ 300 à 600 participants, derrière des leaders motards. À Lyon, le groupe Colère69 est toujours géré depuis la Dordogne. Il est peu actif. Ailleurs, cela dépend... On trouve des motards FFMC ou proches qui engagent à aller aux manifestations de la FFMC, comme en Picardie, d'autres qui y ajoutent des actions locales, comme à Chartres (Eure-et-Loir) ou à Lille (Nord)...
 

Les manifestants en Saône-et-Loire (copie d'écran).

 

Les CGU de Facebook comme règle du jeu

 

Le problème principal est justement la « spontanéité » du mouvement. Dans un syndicat, un parti, les chefs sont élus au terme d'une carrière au service de l'organisation. Ils sont responsables devant des instances qui existent depuis des années. Quand, à la CGT, Monsieur Martinez annonce une grève des cheminots, le syndicat l'a déjà décidée collectivement, organisée avec ses affiliés élus dans les entreprises, qui négocient avec les directions locales... Là, Leandro Nogueira n'est pas élu, il est administrateur d'un groupe Facebook. Sa règle du jeu, ce sont les conditions générales d'utilisation de Facebook... S'il lance un appel pour trouver de nouveaux administrateurs, il peut les choisir, les révoquer. S'il existe une démocratie interne au groupe, c'est par le biais de sondages (quelle action préférez-vous ?). Parfois, des réunions sont organisées dans la vraie vie, dans des cafés.
 

Pour l'Etat, cette désorganisation est problématique. Il a besoin d'un interlocuteur avant d'assurer la sécurité d'une manifestation. Au 1er Mai, à Paris, en cas de heurts en fin de manif entre CRS et groupes de « casseurs », les responsables syndicaux, en contact permanent avec la police, appellent leurs manifestants à évacuer rapidement la place de la Nation.


Les groupes Colère, pratiquant le blocage de circulation aux ronds-points ou sur l'autoroute, peuvent aussi être agressés par des automobilistes mécontents. Les forces de l'ordre ont besoin de savoir qui manifeste et où ou de pouvoir contacter les responsables de la manifestation pour gérer ce cortège de plusieurs centaines de voitures, motos ou marcheurs. Or, la direction est floue, répartie sur plusieurs personnes, inexpérimentées, et soumises aux initiatives impromptues des uns ou des autres... Et qui ne sont pas responsables devant leur organisation. Si ce n'est peut-être sur Facebook à travers les commentaires d'après manifestation... 

 

Répression : un par un comme au ball-trap

 

Et voilà qui arrange bien « le pouvoir ». Une manifestation politique ou syndicale classique a des responsables qui veulent montrer qu'ils ont du monde derrière eux, pour négocier ensuite. Là, on n'a pas un groupe institutionnel mais des individus qui donnent leur nom sur Facebook, qui se photographient ou se filment en train d'agir, qui sont identifiables. Le principe est, pour le procureur du lieu, d'aller chercher la tête de liste, les administrateurs ou, en cas d'infraction, de repérer les auteurs et de les convoquer individuellement ensuite. S'ils appartenaient à une organisation, celle-ci pourrait peser, demander à être reçue, payer un avocat, négocier, réparer les dégâts sur ses fonds propres... Là, non, chacun va seul expliquer à la gendarmerie pourquoi il entravait la circulation ce jour-là. Cela dit, la justice peut reconsidérer l'action, admettre que c'est une manifestation politique et relaxer tout le monde...


Les personnes convoqués ont été soutenues par des membres du groupe.
 

La première victime de cette organisation tribale, avec un chef et des troupes rassemblées le jour de la bataille, victime donc de sa création, ce fut Leandro Antonio Nogueiras. Sans chercher beaucoup, l'Etat s'est rendu compte qu'il aurait pu être incarcéré pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la manifestation politique. Et l'a placé en détention. Suggérant dès le début de « tout bloquer », même les centrales électriques, et le créer le chaos (écrit « KO »), il s'était attaqué à plus fort que lui.

 

Quel programme ou projet ?

 

Et là, on en vient au projet politique de cette révolte... Le site "Vous en avez marre, c'est maintenant" affiche toujours "Bloquons tout". Les affiches évoquent de nombreuses raisons de descendre dans la rue. On retiendra (c'est en fond sur l'affiche ci-dessous) : la CSG, les retraites, les taxes et impôts, le refus de l'Europe, le refus des vaccins, mais aussi une lutte conte « l'oligarchie » et les médias corrompus, dit les « merdias ». Cette hostilité se traduit même par des menaces téléphoniques de violence. Les groupes Colère entendent manifester devant le siège du Journal de Saône-et-Loire, devant La Voix du Nord à Lille... Samedi 17 février au soir, c'est pourtant la presse régionale qui fera les comptes. Pas de manif à Paris ni Lyon...


 

 

 







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