Grand Paris Société

Alerte sur la forêt des Trois Pignons

Publié le  Par Fabrice Bluszez

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Une lettre a été publiée dans Libération, signée par un collectif de personnalités, inquiètes pour la forêt des Trois-Pignons, à l'ouest de Fontainebleau (Seine-et-Marne).

 


C'est un magnifique ensemble de collines boisées, au sol sablonneux, hérissé de blocs de grès qui font le bonheur des fans d'esclalade. Le sentier balisé dit des 25-Bosses attire les promeneurs, les randonneurs comme les sportifs. Or, il est prévu d'abattre des arbres. Voici le texte adressé au directeur général de l'ONF, par Jean-Christophe Rufin, écrivain, Lucas Belvaux, cinéaste, Jacques Laskar, astronome, entre autres, et publié dans Libération ce vendredi 4 décembre. Une pétition a obtenu, ce dimanche 5 décembre, près de 4.500 signatures.

 

Ce 6 janvier, vous prendrez officiellement la direction de l’Office national des forêts. Au même moment, commencera un chantier de coupe de 120 hectares dans la forêt des Trois Pignons.

Connaissez-vous cette forêt extraordinaire ?
 

En réalité, peu importe. Ce qui importe c’est que chaque année des millions de personnes viennent se promener, grimper, jouer dans le sable avec leur bébé, faire du cheval, se reposer, trouver du calme, du bonheur gratuit à moins de cent kilomètres de Paris.

Ce qui importe, c’est que cette forêt est d’une beauté inouïe, parsemée de rochers, de chaos envahis de mousses et de lichen, traversée de vallées couvertes de bruyère. C’est ici que des dizaines d’enfants des écoles de la banlieue sud viennent découvrir que la vie n’est pas que béton, immeubles, voitures, bitumes, bruits et fureur.
 

Ce qui importe, c’est qu’on y vient de toute l’Europe pour escalader ses rochers, faisant de cette forêt une vitrine de la France.

Les Trois Pignons est un morceau de poésie pure, l’endroit ou l’imaginaire devient réalité.
 

Cet endroit, Monsieur le directeur-général, devrait être un sanctuaire dédié à la beauté du monde. Et cela devrait faire consensus d’autant plus facilement que sa rentabilité économique est quasi nulle.
 

Car ici, le sol est pauvre. Ce qui pousse est chétif, tordu, bancal. C’est justement ce qui fait sa beauté. Rien n’est droit, rien n’est plat. Les sentiers s’enroulent autour des blocs comme s’ils hésitaient sur la direction à prendre et chacun des virages révèle un nouveau rocher, une nouvelle grotte, une mare.
 

Si quelques arbres ont réussi malgré tout à devenir «remarquables» les couper n’en serait que plus grave.

Car ces arbres, tous, seront vendus à un prix qui couvrira à peine le prix de leur abattage. Huit euros le stère, nous dit-on.

Si on peut aisément chiffrer combien ce chantier pourrait rapporter, on peut aussi facilement évaluer la perte en regard. Elle est immense.

La valeur de cette forêt n’est pas financière, elle est poétique. Elle est sociale.
 

Les 3 000 signataires de la pétition mise en ligne il y a quelques jours en témoignent dans les récits qu’ils font de l’histoire qu’ils partagent avec cette forêt, certains depuis des dizaines d’années.

Pourtant, le 6 janvier, jour de votre entrée en fonction, cet endroit enchanté va devenir une «usine à bois».


Des saignées de plusieurs mètres de large seront ouvertes tous les 24 mètres pour ouvrir le passage à des engins toujours plus lourds et encombrants. Dans ces cheminements, rectilignes, plus aucun arbre ne subsistera. Des zones «mises à blanc» qui représenteront plus de 16 % de la surface totale. Plus d’arbres. De bruyère. De champignons. Plus de mousses. Plus de lichen. Dans ce véritable quadrillage, ne resteront que des ornières dans le sable, un sol tassé et des restes de branches coupées.


A ces surfaces sur lesquelles il ne restera rien, il faut rajouter les 20 à 30 % d’arbres abattus dans les parcelles.

Une année comme celle-ci où vos services ont compté entre 100 et 200 hectares d’arbres morts pour cause de sécheresse, est-il indispensable d’en rajouter ?


Comme vous le disiez lors de votre récente audition au Sénat, une nouvelle ambition pour la forêt est possible. Vous disiez aussi avoir cru comprendre que les intentions du gouvernement et du chef de l’Etat étaient de formuler, dans les mois qui viennent, une ambition pour les forêts françaises, une ambition qui ne pouvait se construire que sur les attentes des citoyens.


Dans quelques mois, il sera trop tard pour la forêt des Trois Pignons.

Monsieur le directeur-général, sous quels auspices déciderez-vous d’ouvrir votre mandat ?


Il est encore temps d’empêcher cette catastrophe. De faire de cette forêt exceptionnelle un laboratoire de ce que pourrait être la forêt de demain et des rapports plus harmonieux entre les usagers de la forêt et ceux qui la travaillent.

Soyez celui qui prend le temps de s’arrêter et qui regarde avant d’agir.


Ils sont si rares les endroits où la beauté s’incarne et vit.

Ne laissez pas disparaître celui-ci. La perte serait irrémédiable.


 







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